Depuis de nombreuses années, différents groupes de recherche travaillent sur la mise au point d’un support particulier appelé « papier électronique ». C’est un dispositif d’affichage qui présente les qualités de réflexion du papier et qui peut être mis à jour de manière électronique. Le fonctionnement de ce dispositif repose sur une encre électronique intégrée dans le « papier ». Seul l’apparition d’un texte ou son renouvellement sont liés à des impulsions électriques de faibles intensités (peu consommatrices d’énergie) après quoi ce support ne consomme plus d’énergie pour maintenir l’affichage. A en croire les sociétés qui soutiennent ces projets, les applications pour cette technologie semblent ne rencontrer aucune limite.
Le papier électronique inventé par Xerox porte le nom de » Gyricon » du grec, gyros : tourner et icône : image. Ce prototype concernant une nouvelle technologie d’affichage, est constitué d’une base de plastique souple sur laquelle repose une couche « d’encre électronique ». Cette couche d’encre est composée de milliers de minuscules billes bichromiques (mi-blanches et mi-noires) réparties à l’intérieur d’un film de silicone transparent. Le Gyricon, ainsi constitué, possède des propriétés qui tendent à se rapprocher de celles du papier. La lecture sur ce « papier électronique », comme sur le papier, résulte de la réflexion de la lumière ambiante. En nécessitant uniquement de l’énergie pour modifier l’affichage, ce prototype consomme 50 fois moins d’énergie que les livres électroniques de 1ère génération de type écran d’ordinateur.
Dans les années 90, le MIT développait une approche originale de cette question, une « encre électronique » applicable sur différents types de supports dont le papier et c’est là, outre les propriétés spécifiques de cette encre, le point intéressant de cette technologie. Le côté séduisant de cette technologie réside dans l’obtention d’une image qui ressemble plus à une impression sur du papier qu’à une image sur un écran d’ordinateur, l’avantage indiscutable étant de pouvoir faire varier l’image de chaque page par programmation. De plus, cette encre électronique peut s’appliquer sur les deux côtés d’une feuille de papier ou d’un autre matériau et le papier couché avec cette encre garde une certaine souplesse. Il peut être roulé ou courbé sans problème. Il peut également être photocopié.
D’autres matériaux présentent des potentiels intéressants visant à obtenir une encre électronique colorée. A cet effet, Kolodner et ses collaborateurs des laboratoires Bell ont mis en évidence les propriétés particulières d’une protéine, la bacteriorhodopsine, contenue dans la membrane d’une bactérie « l’halobacterium salinarium » qui vit dans des eaux saturées en sels. Cette protéine, responsable de la couleur violette de la membrane de cette bactérie, est constituée d’un composant le rétinal qui, lié à un aminoacide, induit cette coloration prononcée. Lorsque le rétinal se trouve en solution non lié à l’aminoacide, il est d’une couleur jaune pâle. En plaçant en sandwich ce film de protéine entre deux plaques transparentes sur lesquelles est appliqué un fin maillage d’électrodes, on peut réaliser un prototype intéressant. Sous l’effet de voltages appropriés appliqués en différents points du film, il devient possible de faire apparaître une page de texte ou d’image. Comme pour les papiers électroniques, ces images sont, bien entendu, visibles à la lumière du jour. Ce film de protéine présente un contraste élevé et un temps de réaction de l’ordre de 200 millisecondes. Le principal problème tient au voltage très élevé à appliquer pour obtenir la réaction : de l’ordre de 4000 Volts. Difficile dans ces conditions de prévoir des applications viables tant que le niveau n’aura pas été réduit au moins d’un facteur 100. Même si cette dernière technologie paraît séduisante, il faudra encore du temps avant qu’elle puisse voir le jour sur le marché.
D’autres développements, sur le thème papier, tendent à permettre la réutilisation à volonté de ce matériau. Grâce à différents systèmes, l’impression sur le papier disparaît le laissant prêt pour une nouvelle utilisation. Dans un contexte de réglementation environnementale et de réduction des coûts, ce concept pourrait très bien trouver des débouchés chez le particulier ou au bureau.
Au Japon, de récentes études ont montré que seulement 54 % du papier est aujourd’hui recyclé, du fait d’obstacles techniques et budgétaires. Pour » sauver leur forêt « , des ingénieurs de Toshiba ont eu une idée géniale, inverser le processus qui fait qu’un texte (ou des images) apparaissent sur du papier thermique. Ils ont ainsi mis au point une encre décolorable qui présente d’énormes potentialités d’applications (journaux, magazines, stylos, toners pour photocopieurs). Tous les procédés d’impression existant seraient susceptibles d’être concernés moyennant juste un changement de l’encre. Dans cette optique, l’encre décolorable contribuerait au recyclage du papier sans apporter de profondes modifications aux équipements d’impression et aux pratiques qui en découlent. Cette nouvelle génération d’encre, encre décolorable qui ne contient pas de carbone, va apporter une dimension très intéressante au recyclage du papier. Le fabricant japonais espère commercialiser rapidement cette technologie écologique.
Les laboratoires du MIT travaillent également au développement d’un « papier électronique réinscriptible » qui est imprimé et effacé à volonté par passage dans une imprimante électromagnétique. Ce « papier électronique » n’a, en fait, rien à voir avec du papier puisqu’il n’est constitué que de feuilles ultra minces de plastique. Ces pages comportant une couche d’encre électronique en surface sont introduites dans une imprimante spéciale qui fera apparaître ou disparaître un imprimé. Une fois effacée, la page redevient blanche et est prête pour une nouvelle utilisation. Et cette opération est garantie pour des millions de fois.
Plutôt que de se positionner en concurrent du papier, ces nouveaux développements pourraient apporter une nouvelle jeunesse ainsi qu’un caractère interactif à ce matériau. Bien entendu leur développement dépendra de leur adéquation ou non à de réels besoins des utilisateurs au moment de leur sortie sur le marché. Dans le domaine des industries graphiques, les applications actuellement en perspective concernent plutôt le secteur du livre et de la presse. Par exemple, le domaine des livres scolaires pourrait être porteur pour les livres électroniques papier. Pour les élèves, n’avoir qu’un seul volume dans son cartable comprenant tout le programme de l’année entraînerait une réduction considérable du poids des cartables. De plus selon Joseph Jacobson, l’arrivée de ces nouveaux livres électroniques fournit, à une profession qui constate la stagnation de ses marchés, l’occasion d’entrer réellement dans l’ère informatique. L’encre électronique, quant à elle, ouvre de nouveaux horizons au concept d’impression. En effet, les enjeux de ces technologies reposent sur les méthodes de dépôt de cette encre. Si les procédés d’applications selon les techniques de reproduction des circuits imprimés ont déjà fait leur preuve, l’utilisation des procédés conventionnels d’impression de l’encre sont actuellement à l’étude.
Source : CERIG
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